Témoignages JRS
Le dimanche 29 septembre, journée mondiale des migrants et dans le cadre de la messe unique du 5e dimanche du mois, a eu lieu une présentation de JRS Welcome et de l’accueil des migrants sur la paroisse. Par la suite, une présentation de JRS Welcome a été faite dans la feuille paroissiale. Par manque de place, nous ne pouvions pas publier les témoignages faits, vous les trouverez donc ci-dessous :
Nous avons débuté notre participation à JRS l’année 2021/2022. Nous avions régulièrement entendu les appels à ouvrir sa porte pour accueillir un migrant, et étant à la retraite tous les deux nous avons franchi le pas.
Les temps de réunion avec l’équipe de JRS nous avaient permis de bien connaître le cadre de ces accueils, avec une équipe à l’écoute des questions et soucieuse de donner tous les éléments. Les témoignages des personnes qui avaient déjà accueilli des jeunes ont été importants pour nous, de même que ce cadre bien clair (4 semaines d’accueil, un couple référent de la personne accueillie…) On ne se lançait pas tout seuls dans l’inconnu.
Malgré tout nous étions un peu inquiets pour notre premier accueil...est-ce qu’on saurait s’adapter au jeune, est-ce qu’on saurait être accueillant, est-ce qu’il se sentirait bien chez nous ?
Le moment passé avec le couple référent qui nous amène le jeune est important. Outre les informations sur les rendez-vous éventuels, la formation en cours, on se cale ensemble sur les conditions d’accueil à la maison, ou s’il y a des besoins spécifiques à prendre en compte. On sait qu’on peut les contacter si souci.
Nous savions qu’il n’était pas opportun de poser des questions sur son parcours, car c’était quelque chose de douloureux, abordé dans un autre cadre.
Ainsi nous avons plutôt appris des choses sur la vie en Guinée, au Cameroun, au Congo, que ce soit les différentes ethnies, les cultures (fruits, légumes...), l’accessibilité à l’eau, la vie de tous les jours (pas de temps de repas comme chez nous...), les différentes religions (musulmans, protestants, évangéliques, catholiques, animistes…), les différents rites, les rôles et relations bien définis entre les membres des familles, le problème de la corruption, le travail qui ne suffit pas pour vivre décemment quand il y en a...
Nous avons fait la connaissance de jeunes très différents, qui ont tous une volonté réelle de se former, travailler et de construire une nouvelle vie. A noter une passion commune : le foot !
Les tempéraments sont différents, de même les histoires, le pays d’origine, le contexte de vie en Afrique. Et c’est enrichissant de découvrir tout cela ! Ils partent car ils ne voient pas d’issue, pas d’avenir chez eux.
Nous avons aussi appris à respecter les silences, souvent dus au souci, au stress lié à la situation, l’attente qui n’en finit pas au sujet de ces papiers, l’angoisse de recevoir un éventuel refus après un rendez-vous à Paris difficile à préparer et à vivre.
Parfois nous avons reçu le partage du souci de fond sur la situation, ce qui a déclenché le départ. Et parfois aussi, des éléments sur le long périple, les embûches, les souffrances, les mauvais traitements reçus….Partage qui laisse sans voix, car c’est terrible de savoir que des jeunes de même pas 20 ans ont pu subir. Parfois leur voyage a duré plusieurs années (7 ans pour l’un d’entre eux...)
Autre aspect douloureux, celui de la famille qu’ils ont laissé au pays...Là encore on évite les questions, et on prend ce qui vient au fil des échanges (parfois on peut arriver à demander un peu ce qu’il en est, mais sans jamais insister s’il n’y a pas de réponse bien sûr…).
Tous n’ont pas forcément un périple douloureux et dangereux, mais tous vivent la douleur de la rupture d’avec leur famille restée au pays, avec une communication pas toujours aisée et des incompréhensions. Et douleur de devoir quitter ce pays où ils sont nés et qu’ils aiment.
Cela nous apprend aussi l’humilité, car on s’imagine qu’on va apporter du soutien, une aide, mais il faut savoir rester en retrait et respecter les silences ; le passage de famille en famille n’est pas forcément bien vécu : c’est vrai que pour eux cela demande de s’adapter à de nouvelles personnes, de nouveaux lieux. Mais en contrepartie, c’est quand même une ouverture pour eux, des connaissances qu’ils font, et en terme de personnes, et en terme de lieux.
En pratique cela se passe tout simplement, c’est un partage de notre vie familiale de tous les jours...
Siba, Prince, Jacques, Rahim...Guinée, Cameroun, Congo…Il y aurait dû avoir aussi Aboubakar, mais il a malheureusement été emmené en Espagne.
A chaque accueil une petite appréhension, mais à chaque départ c’est le souvenir d’une belle rencontre, d’un témoignage.
Voilà, on commence par ouvrir sa porte, et puis on ouvre son cœur à un frère. C’est le moyen d’élargir sa tente, oui notre porte reste ouverte à l’imprévu de Dieu.
Une famille JRS
Comment se lancer ? Pour tout renseignement, adressez un courriel à welcome.st.etienne@jrsfrance.org
Bonjour à tous,
Je m’appelle Cyriaque SOME, je suis de nationalité Burkinabé, un pays situé en Afrique de l’Ouest. Cela fait précisément deux ans que j’ai fui mon pays pour immigrer en France. En effet, je suis natif du village de Kampti, un département situé au sud-ouest du Burkina. Orphelin de père depuis l’âge de trois ans, j’ai été recueilli par mon oncle avec qui je vivais à Djibo (Nord du Burkina), localité où celui-ci était établi depuis belle lurette avec sa famille. Tout se passait super bien avec mon oncle car c’était un homme travailleur et un très bon père pour moi. Je précise que mon oncle était un fervent croyant chrétien catholique et nous vivions en parfaite harmonie dans la ville de Djibo avec la communauté en majorité musulmane. Mais à partir des année 2016-2017, avec l’arrivée des pseudo Salafistes musulmans communément appelés les djihadistes dans la ville de Djibo et environs, le climat social s’est détérioré car ceux-ci semaient la terreur, pire ils forçaient les chrétiens à se convertir à l’Islam car selon eux, c’est la seule et unique religion d’Allah. A maintes reprises nous avions été victime de menaces de mort de la part de ces individus sans foi ni loi.
En ma qualité de président de JEC (Jeunesse Etudiante Chrétienne) que j’étais, j’ai été battu par ces groupes djihadistes et conduit devant mon oncle à qui ils ont intimé l’ordre de changer de religion autrement il serait exécuté avec sa famille. Malgré ces menaces nous n’avons pas fléchi à leurs injonctions et j’ai continué à sensibiliser la jeunesse de ne pas suivre ces bandits car Dieu prône la cohésion, l’entraide et la solidarité fraternelle.
Un jour pendant que j’étais en pleine sensibilisation, un Pick up avec des hommes encagoulés se dirigeait vers nous à vive allure. Nous nous sommes dispersés rapidement mais ils ont ouvert le feu atteignant mortellement un de mes camarades. Paniqué, de ma cachette j’ai appelé vainement mon oncle pour expliquer que j’étais en danger. J’ai fini par joindre un voisin qui m’a confirmé que mon oncle avait été tué par ces Djihadistes. A l’annonce de cette triste nouvelle, c’est comme le ciel qui s’est écroulé sur moi car je voyais mon avenir déjà hypothéqué. De ma position, je ne suis plus rentré au domicile de peur de subir le même sort que mon oncle. Ainsi j’ai décidé d’aller à l’aventure dans un pays lointain dans l’espoir d’être en sécurité. Je traverse le désert via l’Algérie et la Libye. Après quelques moments passés au Maghreb dans des conditions inhumaines, j’ai réussi à traverser la Méditerranée à travers une embarcation de fortune et me retrouve à Lampedusa en Italie. Ensuite j’arrive en France et précisément à Saint Étienne.
Après avoir dormi quelques jours dans la rue, j’ai été accepté à la maison solidaire par Valentin PORTE qui a réussi à me faire héberger par une famille qui accueille au sein de l’association.
J’avoue qu’il y a de cela 3 ou 4 ans je n’avais jamais imaginé me retrouver dans cette situation car tout se passait bien dans ma vie dans mon pays. Toujours avec le soutien de Valentin je suis inscrit au lycée des Collines à Rive de Gier pour une formation dans les métiers du commerce et de la vente.
Après une année scolaire passée dans cette famille d’accueil, je suis hébergé à JRS pour la suite de mon année scolaire. Je tiens à préciser que mon passage à JRS a été très capital pour moi, car j’ai côtoyé plusieurs familles très chaleureuses qui m’ont aidé dans mon parcours d’intégration en France.
J’ai passé une superbe année scolaire sanctionnée par l’obtention de mon baccalauréat professionnel avec mention ’’Bien’’ grâce aux familles JRS.
Après quelques moments d’attente j’ai obtenu la protection internationale auprès de l’OFPRA, donc le statut de réfugié en France.
Actuellement je poursuis mes études supérieures en BTS MCO car j’ai été retenu après un entretien à Leclerc d’Andrézieux pour une alternance de deux ans.
Avant de terminer, je tiens à remercier en particulier la maison solidaire à Saint Etienne par le biais de son coordonnateur Valentin PORTE, la grande famille JRS mais surtout les familles : Emmanuel et Gisele BON, Denis et Muriel GRANGE, Michel et Véronique GUIRIMAND, Catherine et Pierre VILLEMAGNE, Bernard et Odile POITAU, les Jésuites, Jean et Jacqueline CATEUBLE, Coline et Yves VOIRIN, Bernard MOULIN mon référent. Toutes ces familles ont été d’un soutien inestimable dans toutes les épreuves que j’ai traversées. Je leur témoigne toute ma reconnaissance. Que le Seigneur leur accorde la santé et la longévité.
Je vous remercie pour votre attention.
Cyriaque SOME
Etudiant BTS MCO, à la MFR Montbrison, Alternant Leclerc d’Andrézieux
01/2025